Les répercussions des A.P.S (actions de préventions sportives) sur les personnes présentant des déficiences et inadaptations (Cours de Jean Bilard par
D Martinez-etnoka )
Ce résumé d'un cours sur ce sujet vient éclairer ce qui sous tend les pratiques sportives à l'EMP et au SSSI. C'est un mode ludique de relation au jeune où le plaisir de la découverte et de
l'exercice permet le developpement de compétences variées. Ce sont bien sur les compétences motrices et kinesthésiques, mais également ,les relations sociales et les représentations d'actions ou
de situations.
1. APS et Déficience mentale
Les résultats des effets de l’activité physique sur l’amélioration de l’image de soi et les processus cognitifs des déficients mentaux sont encourageants.
Bell (1977) a mis en évidence une évolution positive de l’image de soi et des communications avec les autres chez des enfants participant aux Spécials Olympics.
Ces résultats sont confirmés par Wright (1966) et Gibbons (1989) qui montrent l’augmentation du sentiment de compétence physique et d’adaptation sociale après une compétition de
natation.
Les limitations des répercussions des APS sur les enfants déficients intellectuels pourraient être dues au fait que fortement stigmatisés par le regard de l’autre et la différence corporelle, la
pratique sportive ne permet pas l’effacement symbolique du handicap et la valorisation du sujet par la compétition, les deux représentations (le débile / le sportif) étant trop antagonistes
(Brunet, 1980; Genolini, 1994, cf cours).
Le sport est perçu comme moyen de normalisation des conduites perturbées, de developpement de la communication, de la socialisation, une thérapie ou une rééducation corporelle au mieux une
acculturation souhaitable.
Quelques études (Corder, 1966) ont démontré qu’un programme d’APS pouvait entraîner une amélioration du QI, une levée de l’inhibition intellectuelle.
Les raisons de ces effets sont expliquées par l’augmentation de la confiance en soi acquise en sport, entraînant une participation au groupe classe, puis par contre transfert positif du maître
l’augmentation des performances intellectuelles.
Les enfants déficients sont très vite rejetés dans les jeux avec les autres, ils ont donc un mauvais développement psychomoteur par manque d’actions et de sollicitations, ce retard s’accroît avec
l’âge entraînant un mauvais niveau des capacités et des habiletés. Plus la déficience est grande plus les répercussions au niveau des capacités motrices sont importantes. Cependant des progrès
peuvent être rapidement attendus au niveau des enfants présentant un niveau de déficience peu élevé au niveau de l’image de soi, des performances scolaires, des habiletés sociales, de la
condition physique.
Complexification des relations en fonction des APS (Classification de Marcenach)
b Relation et communication nulles : Relaxation
b Relation à l’environnement et communication indirecte : Escalade, spéléologie, athlétisme, gym, natation, plongeon, voltige, saut à ski
b Relation individu environnement médiée par l’engin, communication indirecte ; haies, saut de cheval, lancers, haltérophilie, cyclisme, canoë,
ski, voile, agrès
b Relation de couple ; sports de combat, tennis, jumping
Relations collectives sans instruments ; rugby, hand ball, basket ball, volley Ball, avec instruments ; hockey, base-ball
b Communication poussée au plus haut degré ; danse folkloriques, danse classique, expression corporelle.
b Complexification des réseaux de communication f (nb de joueurs et possibilités de communication (cf; Parlebas)
L’agrandissement des espaces selon les sports pratiqués (Classification de Parlebas):
b Espaces sportifs, le club, les rencontres locales, régionales, nationales, internationales.
b Les espaces théoriques de jeu : Volley ball (15 m2), basket (36), hand ball (59), rugby (30) Football (34).
Ainsi les objectif pédagogiques d’un projet d’établissement pourraient être : Multiplier les situations sportives en jouant sur les facteurs « communication » (Adversaire / NA;
Partenaire/ NP) « espace » « environnement » (Incertitude du milieu extérieur/ Non incertitude du milieu extérieur).
Pour Kostrubala (1976), les APS ont des effets sur les troubles névrotiques divers. Le sport et l’imaginaire qu’il sous-tend développe la production des rêves et permet une
production de matériel inconscient important qui renforce le déroulement d’une psychothérapie. Il est donc largement utilisé comme médiateur d’une psychothérapie analytique au niveau des
personnes présentant des troubles mentaux.
3. Les effets des APS sur les troubles dépressifs
Les patients dépressifs comme les patients présentant des troubles psychiatriques sont peu actifs et présentent une mauvaise condition physique générale (Martinsen, 1990 - Coppenolle,
1992)
Pour Brown (1978) tout programme de traitement de la dépression devrait inclure des exercices vigoureux.
Kavanaugh (1975) souligne l’effet positifs sur les états dépressifs post infarctus.
Griest (1979) montre que les effets d’un programme d’APA sont comparables avec les effets d’une psychothérapie conventionnelle pour des patient souffrant de dépression névrotique
et que les améliorations se confirment sur un suivi de 9 mois.
Faisant une revue de la littérature à ce sujet Plamondon (1982) conclue à l’effet anti-axiolitique et antidépresseurs du jogging.
En Europe on peut se référer aux travaux de Van Coppenolle et son équipe (1992-95) dont les protocoles sont publiés dans l’ouvrage « la
condition physique pour l’intégration sociale ». Les auteurs concluent que les effets antidépresseurs sont plus en relation avec les effets subjectifs que les patients attribuent au
programme qu’en corrélation avec la variation des indicateurs de la condition physique.
Pour Neerinckx (1995) ce qui est le plus important dans le traitement sportif ce sont les qualités humaines du thérapeute. « L’exercice physique » est en premier lieu
une technique « d’intervention psychologique ». On attend de lui « disponibilité, empathie » condition indispensable pour que le patient puisse discuter de ses problèmes et se
sentir soutenu dans son expérience de transformation. L’enseignant est ici en position d’accompagnement et d’écoute du patient plutôt qu’un enseignant d’une technique corporelle ou un entraîneur.
4. Les effets des APA sur les troubles du comportements
L’utilisation des APS dans la prophylaxie et la thérapeutique des troubles du
comportement a été problèmatisée depuis 1963 par des auteurs comme Perié et Amiel qui ont prôné leur utilisation auprès des délinquants et des personnes en maison d’arrêt. Ces
problématiques ont été reprises par Courtine (1994), Clement (1997 cf cours).
Pour les enfants et adolescents présentant des troubles du comportement, le jeu sportif est un puissant moyen de socialisation. Pour le caractériel la règle sportive est au départ subie comme
toutes les autres contraintes; elle est donc immédiatement transgressée. L’agressivité se déclare massive, inorganisée, inadaptée. Le caractériel ne peut coopérer avec autrui, parce qu’il est
rejeté par sa névrose dans un comportement infantile, réactionnel, pathologique aggravé par la transgression qui appelle l’angoisse, le châtiment.
Le travail pédagogique doit opérer par paliers :
b Dans un premier temps il faudra provoquer la libération des décharges motrices impulsives (activités à sensations, à risques)
b Ensuite rechercher un début de maîtrise avec les objets (injection de technique)
Quand les relations adolescents-éducateur seront positives et stables, le jeune sera amené à participer à des activités de groupe, apprenant à coopérer.
Les jeux évolueront vers le sport c’est à dire la prise en compte de la règle, le respect des codes et l’arbitrage d’un tiers.
Barnes (1981) dans une étude portant sur 56 enfants atteints de différents troubles du comportement a montré qu’un programme de course à pied d’une durée de 12 semaines à raison
de 4 séances par semaine permettait de contrôler plusieurs troubles du comportement d’une façon aussi efficace que les psychotropes.
Callède (1985) met en rapport les caractéristiques des populations présentant des difficultés d’intégration scolaire et sociale et les caractéristiques des APS pour dégager une
organisation pédagogique des APS pour ces populations.
Bilard (1995-97) après une analyse des caractéristiques des populations psychopathes propose un modélisation d’intervention pluridisciplinaire dans laquelle le professeur d’EPS
interviendrait en collaboration avec des psychothérapeutes des éducateurs sociaux pour tenter une prise en charge globale du sujet.
Le Breton (1995) nous rappelle que si le sport fait une entrée royale auprès des populations des jeunes en difficulté et peut être pour certains un élément de valorisation parmi
d’autres c’est par la scolarisation, l’animation sociale et culturelle qu’on luttera contre l’exclusion. Sans la reconnaissance des jeunes, sans la reconquête de la dignité qu’on leur refuse,
sans une mobilisation contre le racisme et le refus de comprendre l’exclusion ne fera que s’accentuer. Les APS font parfois figure de vitrine masquant l’absence d’une réelle politique de la
jeunesse et des banlieux, pour ces raisons les installations sportives sont souvent les premières à être détruites dans les moments d’émeutes. C’est contre le discrédit attaché à ces populations
qu’il faut lutter, c’est en reconnaissant l’individu dans son identité propre et ses caractéristiques sociales et culturelles que luttera contre la dépréciation et le stigmate qui touche ces
jeunes.
Pour cet auteur, les APS n’ont aucune vertu intrinsecte conférant à leur prescription une efficacité quelconque. Elles ne sont que des outils aux mains des animateurs. Elles ne valent que ce que
valent ceux qui les mettent en oeuvre et ceux qui se les approprient. Elles sont certainement dérisoires au regard de la violence symbolique qui s’exerce sur ces jeunes mais par l’espace
transitionnel et le lien avec l’éducateur qu’elles instaurent elles peuvent changer le regard que chacun porte sur lui même et le regard que l’autre pose sur moi c’est à dire instaurer un
processus d’identisation.
Les APA en proposant une « aire intermédiaire d’expérience » au sens de Winnicott (1974) peuvent permettre que se recrée un processus de construction ou reconstruction
identitaire pour certains sujets en difficulté. Cet engagement au niveau du corps instaurera la personne dans le mouvement, la rencontre avec l’autre, l’émotion lui permettant de vivre sa vie,
c’est à dire travailler, aimer, se distraire fondement de la santé mentale selon Freud.