Globalement, la situation de handicap provoque des limitations transitoires ou durables dans les activités du sujet.
A la différence d’une déficience sensorielle ou motrice, le handicap mental est composé d’un ensemble de limitations parfois peu visible dont les effets entravent les fonctions intellectuelles du sujet : Difficulté dans l’accomplissement des fonctions exécutives dont la difficulté à effectuer un contrôle de son activité, difficultés conatives à se mobiliser, difficultés cognitives souvent à la source de difficultés de maitrise des émotions et de décodage des situations sociales. Cet ensemble de facteurs provoque des difficultés d’apprentissage qui rendent la scolarisation compliquée. La deuxième difficulté est que les conséquences de ces limitations donnent l’image d’une personne dont les besoins (souvent masqués) ne seraient pas si différents de personnes lambda et que les réponses pourraient être plus dans un « renforcement » des moyens que dans une utilisation de technique appropriée. Les autres types de handicap demanderaient des prises en charges techniques et adaptés car lié à une déficience motrice ou sensorielle, l’état de retard mental demanderait un ralentissement du rythme des acquisitions ou un taux d’encadrement un peu plus élevé. Les enfants en situation de handicap intellectuel étant de plus souvent peu bruyants, ou posant peu de problème de discipline, manifestant peu de demandes spontanées, il serait par exemple possible de les inscrire l’été dans des colonies de vacances standard sans prise en charge particulière autre qu’une vague information aux responsables du centre. Cette vision nous apparait comme complètement fausse et c’est un dispositif adapté aux besoins des jeunes reconnus handicapés intellectuels que nous souhaitons présenter ici Mais, pour reprendre une des thématiques forte des PEP, l’enfant handicapé intellectuel a-t-il envie d’apprendre ? Est-il un apprenant dont la place naturelle est à l’école ou en situation de scolarisation ? La réponse est oui car il est un enfant humain dont le déterminisme biologique et social a inscrit dans ses lignes de développement l’acquisition du langage, d’une pensée construite, d’habitudes sociales. La demande de scolarisation et d’apprentissage faite par le projet personnalisé de scolarisation qui justifie aujourd’hui la place d’un jeune dans une institution spécialisé n’est pas qu’une contrainte du législateur, elle répond à un besoin naturel de la condition humaine qui est de développer et de posséder des savoirs universels, condition nécessaire à une reconnaissance de son humanité. On comprend alors mieux les demandes de scolarisation très fortes des familles pour que leur jeune apprenne afin qu’on lui reconnaissance ce statut d’humain que la déficience intellectuelle vient questionner. Etre humain c’est penser, même son quotidien, et ça peut s’apprendre. Mais au vu des entraves multiples que présente le jeune handicapé intellectuel, on peut légitimement s’interroger devant la réponse unique de scolarisation qui est actuellement préconisée. C’est à se demander si multiplier les temps de classe pour un jeune présentant un retard mental ne revient pas à faire pratiquer de l’athlétisme à longueur de journée à un jeune présentant une déficience motrice. Après l’échauffement et la course de haies, on enchaine le sprint puis le lancer du poids et on termine par 1h ou 2 de fond. Bonne journée en ULIS! Je caricature, mais à peine. Les particularités du jeune présentant un retard mental rendent ainsi compliqué l’approche même des fondamentaux que sont la lecture, l’écriture, l’algèbre et les notions présentes dans le niveau 1 du socle commun. Aborder de front ces notions dans un cadre très scolaire provoque souvent un rapport aux apprentissages dénué de sens ou l’enfant va d’années en années répéter les mêmes réponses sur des supports différents. L’enseignant de CLIS puis d’ULIS doit alors faire preuve d’une grande inventivité pour faire durer l’année de CP durant de longues années. On passe du comptage des nounours en primaire à celui des fourchettes de l’atelier cuisine en collège, mais où est le progrès ? Face à cet écueil majeur de la difficulté à apprendre, et étant tout de même sensible à cette question au sein des PEP, beaucoup de pratiques de contournement de la difficulté se sont développés au sein de nos établissements. L’une de ses pratiques assez courante revient à utiliser une pratique pédagogique conseillé à l’époque de l’école normale (quand on pensait que pour enseigner, il fallait une formation) qui était de mettre l’accent sur des thématiques culturelles pour favoriser le sens et provoquer un intérêt chez l’élève. La question d’un éveil de l’appétence aux savoirs est alors première, celle de la prise de sens par le vécu des données enseignées l’est également. Alors faire partir en colonie de vacance ou en classe découverte un jeune présentant un retard mental est une vraie occasion de réunir certaines de ces conditions nécessaires aux apprentissages et à la socialisation.
• Provoquer de l’appétence, une soif de découverte
• Permettre de se découvrir hors du champ familial et du cadre usuel
• Permettre de découvrir d’autres cultures du quotidien, d’autres environnements et par là même de relativiser son propre environnement
Pour arriver à cela, nous avons réunis plusieurs compétences présentes au sein des PEP 60. Une bonne expérience de la situation de retard mental par un SESSAD et un établissement spécialisé, un secteur vacance performant, réactif et à l’écoute des besoins des jeunes, un centre de vacance exemplaire par l’implication de son équipe et la qualité de ses structures. Tout cela réuni nous a permis d’élaborer un dispositif d’encadrement simple et efficace répondant à la problématique suivante Comment passer de l’environnement habituel et connu à ce nouvel environnement ?
EMP de Voisinlieu à Beauvais
Saint Martin en Vercors
Les réponses apportées furent les suivantes:
• réunion de sens ibilisation auprès des familles menée par l’assistante sociale et auquel a participé le responsable DEL
• choix d’éducateurs volontaires pour l’encadrement sur temps de vacances scolaires
• Choix de séjours par le jeune et les familles (plusieurs thèmes : animaux, aventure, découverte) fait avec l’éducateur référent du jeune
• rencontres entre l’éducateur accompagnateur, les jeunes et les familles par petits groupes correspondant aux séjours choisis et explication des modalité du séjours, réassurance du jeune et de sa famille
• Communication avec le centre de vacance pour l’organisation des chambres
• Accompagnement durant tous le séjour d’un petit groupe de jeune par l’éducateur référent.
Lors du séjour, nous visons la compensation et non l’animation. L’éducateur référent n’est pas sensé faire à la place des animateurs du centre mais vient apporter des éléments explicatifs ou prendre du temps avec le jeune quand cela est nécessaire. Par sa présence, il vient rassurer la famille et l’enfant mais également l’équipe d’animation en leur permettant de mieux cibler ce qui est usuel chez l’enfant, son aptitude motrice, sa capacité à participer à un jeu, etc, et ce qui demande une compensation. Par exemple : une démonstration plutôt qu’une explication, un temps d’appropriation des situations plus long, une ritualisation dans certains cas, etc. L’éducateur référent accompagne, fait preuve de vigilance mais n’étouffe pas le jeune par une présence permanente. Il faut éviter de répéter la position des AVS qui ont statutairement une place totalitaire auprès des jeunes et perturbe leur prise d’autonomie. L’éducateur se doit de s’effacer quand son intervention n’est pas nécessaire. Un autre intérêt est que ces modalités de compensation vont également profiter au reste de la troupe en apportant un soin amélioré aux modalités d’animation proposées. Il y a alors un intérêt conjoint à développer ce type de collaboration. Le jeune passe des vacances agréables et se découvre, l’équipe d’accueil renforce ces compétences. Un point complémentaire qui pourrait être développé serait une formation accentuée des équipes d’animation sur la situation des enfants particuliers.